Les députés fédéraux avaient invité l'Absym, le Cartel, l'Ordre des médecins, le GBS, Domus Medica, la SSMG, la fédération des maisons médicales, la VGWC et un représentant du SPF Santé Publique. En sortant de la séance, je me posais la question de l'image que donnent les médecins au monde politique.

Seuls trois des six intervenants du monde médical ont respecté les dix minutes du temps de parole. Certains ont dépassé largement la demi-heure. Peu de médecins se sont tenu au sujet. Un syndicat minoritaire a critiqué son grand frère. Un médecin généraliste a demandé la suppression des " consultations de ville " des gynécologues et des pédiatres. Il a proposé une forfaitarisation complète de la médecine et une limitation du temps de travail des médecins à 40h/semaine. Un syndicat a demandé l'échelonnement et a proposé la pratique de la médecine spécialisée uniquement en milieu hospitalier. Parlons-nous de réforme ou de réflexes corporatistes ? Aucune vision des soins, uniquement un maintien de l'acquis. Un réflexe bien syndical...

Points faibles et points forts

Personnellement, j'ai essayé d'expliquer les points forts et faibles du système actuel et l'évolution de la compétence et de la connaissance médicale. Le point fort numéro un du système belge est : l'accessibilité aux soins. Le patient peut consulter directement un médecin généraliste ou un médecin spécialiste. Ce point fort est détruit purement et simplement par les confrères qui exigent l'échelonnement des soins et ceux qui interdisent la médecine spécialisée hors hôpital. Cet échelonnement n'est pas pour améliorer le système de soins de santé pour le patient. C'est un souci d'économie et un réflexe corporatiste où l'on interdit à un autre médecin de " s'occuper " de son patient. La réforme des hôpitaux avec l'hôpital locorégional, l'hôpital locorégional avec des soins spécialisés et enfin les points de référence devrait transformer le paysage hospitalier et faire une sélection des médecins spécialistes qui y travaillent. Un médecin spécialiste qui sera " basic ", ou un médecin spécialiste avec une pratique courante, ou l'expert du point de référence.

Se posera demain le problème de la connaissance et de la compétence. La connaissance d'une médecine universelle et encyclopédique n'existe plus pour autant qu'elle existât un jour. Tout médecin aura son champ limité de compétence et de connaissance, soutenu demain par l'outil informatique. Si la médecine est un art de guérir, le terme art perd de son aura. La médecine de demain est une science, une technicité, une relation humaine et une profession. Les soins de santé sont un business qu'on le veuille ou non.

La MG omnisciente est un leurre

La médecine générale universelle et omnisciente est un leurre. Le médecin généraliste a son champ de compétence qui est essentiellement celui des maladies chroniques de l'adulte jeune ou gériatrique et la médecine préventive. Il devient le co-gestionnaire du dossier médical du patient. Sa compétence en médecine aiguë s'affaiblit, mais sa compétence en médecine interne générale s'accroît. La Suisse a déjà amorcé la réforme en ce sens. La réorganisation des soins d'urgence avec les postes de garde et le 1733 laisse au 112 les urgences " urgentes ". Les postes de garde recevront un champ de compétence limité. En ville, de nombreux parents consultent directement un pédiatre pour la santé de leur enfant. Le médecin généraliste de demain connaîtra la concurrence des pédiatres, des urgentistes, mais aussi des gynécologues et des autres spécialistes.

L'hôpital de demain sera le plateau technique avec les soins high tech. Plus besoin d'hôtel-hôpital. Les durées de séjour seront liées à la nécessité de soins pour des pathologies lourdes. Le médecin- spécialiste aura son champ de connaissance et de compétence " high level ". Il ne devra plus " perdre son temps " pour des examens de dépistage ou des actes de routine qu'on pourra confier à un technicien hyper-spécialisé dans ce domaine. Plus besoin d'une armée de médecins qui font des actes courants et standardisés. Il y a les infirmiers ou techniciens des soins de santé. Le spécialiste effectue l'acte délicat qui exige une compétence, une connaissance et technicité de haut niveau. Il définit le diagnostic et est l'expert du traitement médical. Se pose dès lors la question de la médecine spécialisée de l'hôpital locorégional " basic ". Pas de besoin du super-spécialiste qui travaille dans le point de référence, ou l'hôpital locorégional spécialisé. Le médecin spécialiste de cet hôpital " basic " est un pauvre médecin sans technologie " high tech ". Le service d'urgence de cette institution est obsolète. Pourquoi y recevoir des urgences si l'on ne dispose pas des moyens diagnostiques adéquats ? L'hôpital locorégional se résume à une gériatrie et un hôpital de jour médico-chirurgical. La logique voudra que l'on ferme des hôpitaux actuels pour les transformer en gériatrie, MRS. Le débat sur les professions médicales, le sujet de cette réunion de la commission, est dans ce cas totalement différent de la discussion de la situation actuelle.

Faut-il encore raisonner en échelonnement des soins ? Ne doit-on pas envisager une intégration de soins de santé en fonction des patients, de leur âge, des pathologies et du réseau loco-régional ? Doit-on avoir un réflexe protectionniste ou regarder les compétences et l'intégration de celles-ci dans le nouveau système ?

Paiment à l'efficience

Doit-on payer à l'acte ou au forfait au risque de créer une inefficience par sur-ou sous-consommation. Peut-être qu'un système mixte de promotion individuelle des médecins pour des soins intégrés est une solution plus efficiente. Le paiement à l'efficience. Pas d'efficience sans mesure de la qualité. Et là des non-médecins viendront évaluer (et pénaliser) des médecins. L'exercice des professions de soins de santé sera régulé par des impératifs économiques, des soins efficients et intégrés dans un système.

Les professions médicales ne seraient plus dans le nouveau système des professions autonomes. L'industrialisation de la médecine et la standardisation des soins permettront des économies et limiteront la créativité et le progrès. Le médecin perdra de son aura, de son pouvoir, de son autonomie. Les maisons médicales et l'" hospitalocentrisme " tueront la pratique des médecines solo ou de la pratique spécialisée extramuros. On va échelonner, programmer, standardiser, informatiser. Les non-médecins jugeront de la qualité, de l'efficience et dicteront les pratiques.

Une nouvelle vision n'a pas été discutée en commission de la santé. Au contraire, un réflexe protectionniste a opposé certains médecins et a suscité des réflexes syndicaux et réactionnaires. Dommage...on a peut-être manqué une opportunité ! Et surtout on a perdu l'avantage du système actuel : l'accessibilité ou le libre choix, par le patient, de son médecin.

Les députés fédéraux avaient invité l'Absym, le Cartel, l'Ordre des médecins, le GBS, Domus Medica, la SSMG, la fédération des maisons médicales, la VGWC et un représentant du SPF Santé Publique. En sortant de la séance, je me posais la question de l'image que donnent les médecins au monde politique.Seuls trois des six intervenants du monde médical ont respecté les dix minutes du temps de parole. Certains ont dépassé largement la demi-heure. Peu de médecins se sont tenu au sujet. Un syndicat minoritaire a critiqué son grand frère. Un médecin généraliste a demandé la suppression des " consultations de ville " des gynécologues et des pédiatres. Il a proposé une forfaitarisation complète de la médecine et une limitation du temps de travail des médecins à 40h/semaine. Un syndicat a demandé l'échelonnement et a proposé la pratique de la médecine spécialisée uniquement en milieu hospitalier. Parlons-nous de réforme ou de réflexes corporatistes ? Aucune vision des soins, uniquement un maintien de l'acquis. Un réflexe bien syndical... Personnellement, j'ai essayé d'expliquer les points forts et faibles du système actuel et l'évolution de la compétence et de la connaissance médicale. Le point fort numéro un du système belge est : l'accessibilité aux soins. Le patient peut consulter directement un médecin généraliste ou un médecin spécialiste. Ce point fort est détruit purement et simplement par les confrères qui exigent l'échelonnement des soins et ceux qui interdisent la médecine spécialisée hors hôpital. Cet échelonnement n'est pas pour améliorer le système de soins de santé pour le patient. C'est un souci d'économie et un réflexe corporatiste où l'on interdit à un autre médecin de " s'occuper " de son patient. La réforme des hôpitaux avec l'hôpital locorégional, l'hôpital locorégional avec des soins spécialisés et enfin les points de référence devrait transformer le paysage hospitalier et faire une sélection des médecins spécialistes qui y travaillent. Un médecin spécialiste qui sera " basic ", ou un médecin spécialiste avec une pratique courante, ou l'expert du point de référence.Se posera demain le problème de la connaissance et de la compétence. La connaissance d'une médecine universelle et encyclopédique n'existe plus pour autant qu'elle existât un jour. Tout médecin aura son champ limité de compétence et de connaissance, soutenu demain par l'outil informatique. Si la médecine est un art de guérir, le terme art perd de son aura. La médecine de demain est une science, une technicité, une relation humaine et une profession. Les soins de santé sont un business qu'on le veuille ou non.La médecine générale universelle et omnisciente est un leurre. Le médecin généraliste a son champ de compétence qui est essentiellement celui des maladies chroniques de l'adulte jeune ou gériatrique et la médecine préventive. Il devient le co-gestionnaire du dossier médical du patient. Sa compétence en médecine aiguë s'affaiblit, mais sa compétence en médecine interne générale s'accroît. La Suisse a déjà amorcé la réforme en ce sens. La réorganisation des soins d'urgence avec les postes de garde et le 1733 laisse au 112 les urgences " urgentes ". Les postes de garde recevront un champ de compétence limité. En ville, de nombreux parents consultent directement un pédiatre pour la santé de leur enfant. Le médecin généraliste de demain connaîtra la concurrence des pédiatres, des urgentistes, mais aussi des gynécologues et des autres spécialistes.L'hôpital de demain sera le plateau technique avec les soins high tech. Plus besoin d'hôtel-hôpital. Les durées de séjour seront liées à la nécessité de soins pour des pathologies lourdes. Le médecin- spécialiste aura son champ de connaissance et de compétence " high level ". Il ne devra plus " perdre son temps " pour des examens de dépistage ou des actes de routine qu'on pourra confier à un technicien hyper-spécialisé dans ce domaine. Plus besoin d'une armée de médecins qui font des actes courants et standardisés. Il y a les infirmiers ou techniciens des soins de santé. Le spécialiste effectue l'acte délicat qui exige une compétence, une connaissance et technicité de haut niveau. Il définit le diagnostic et est l'expert du traitement médical. Se pose dès lors la question de la médecine spécialisée de l'hôpital locorégional " basic ". Pas de besoin du super-spécialiste qui travaille dans le point de référence, ou l'hôpital locorégional spécialisé. Le médecin spécialiste de cet hôpital " basic " est un pauvre médecin sans technologie " high tech ". Le service d'urgence de cette institution est obsolète. Pourquoi y recevoir des urgences si l'on ne dispose pas des moyens diagnostiques adéquats ? L'hôpital locorégional se résume à une gériatrie et un hôpital de jour médico-chirurgical. La logique voudra que l'on ferme des hôpitaux actuels pour les transformer en gériatrie, MRS. Le débat sur les professions médicales, le sujet de cette réunion de la commission, est dans ce cas totalement différent de la discussion de la situation actuelle.Faut-il encore raisonner en échelonnement des soins ? Ne doit-on pas envisager une intégration de soins de santé en fonction des patients, de leur âge, des pathologies et du réseau loco-régional ? Doit-on avoir un réflexe protectionniste ou regarder les compétences et l'intégration de celles-ci dans le nouveau système ?Doit-on payer à l'acte ou au forfait au risque de créer une inefficience par sur-ou sous-consommation. Peut-être qu'un système mixte de promotion individuelle des médecins pour des soins intégrés est une solution plus efficiente. Le paiement à l'efficience. Pas d'efficience sans mesure de la qualité. Et là des non-médecins viendront évaluer (et pénaliser) des médecins. L'exercice des professions de soins de santé sera régulé par des impératifs économiques, des soins efficients et intégrés dans un système.Les professions médicales ne seraient plus dans le nouveau système des professions autonomes. L'industrialisation de la médecine et la standardisation des soins permettront des économies et limiteront la créativité et le progrès. Le médecin perdra de son aura, de son pouvoir, de son autonomie. Les maisons médicales et l'" hospitalocentrisme " tueront la pratique des médecines solo ou de la pratique spécialisée extramuros. On va échelonner, programmer, standardiser, informatiser. Les non-médecins jugeront de la qualité, de l'efficience et dicteront les pratiques. Une nouvelle vision n'a pas été discutée en commission de la santé. Au contraire, un réflexe protectionniste a opposé certains médecins et a suscité des réflexes syndicaux et réactionnaires. Dommage...on a peut-être manqué une opportunité ! Et surtout on a perdu l'avantage du système actuel : l'accessibilité ou le libre choix, par le patient, de son médecin.