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Heureusement, la recherche thérapeutique progresse à grands pas comme en témoignent les nombreuses avancées présentées lors des derniers congrès majeurs d'ophtalmologie, EURETINA, en septembre, à Barcelone et AAO, à New Orleans, en novembre dont voici un petit tour d'horizon, certes subjectif, mais très représentatif de la course contre la montre engagée actuellement pour endiguer la principale cause de malvoyance dans le monde.Alors que la génération des baby-boomers entre peu à peu dans la période à risque pour le développement d'une DMLA, une équipe américaine a voulu confirmer la possible réduction de risque par rapport aux générations précédentes comme semblent l'indiquer de précédentes observations. Ils ont regroupé, pour ce faire, les données de suivi visuel et rétinien de deux études de cohorte, l'étude BDES dont le recrutement s'est fait entre 1988 et 1990 et l'étude BOSS qui a recruté leurs descendants entre 2005 et 2008. Après avoir établi le risque de progression sur 5 ans vers une DMLA pour les 5.000 participants à risque, ils ont procédé à une comparaison entre 4 groupes générationnels.Les résultats, publiés dans la revue JAMA Ophtalmology, montrent que l'incidence de la DMLA à 5 ans passe de 8,8 % pour ceux nés entre 1901 et 1924 à 3 % pour ceux de la génération 1925-1945 puis à 1 % pour les baby-boomers (1946-1964) et enfin à 0,3 % pour les plus jeunes nés entre 1965 et 1984, soit une diminution de risque d'évolution vers une DMLA de 60 % à chaque saut de génération. Si cette diminution de risque ne peut s'expliquer par des modifications génétiques, les auteurs y voient plutôt l'influence de l'amélioration générale des conditions de vie et de notre environnement, des progrès de la médecine et de l'accès large aux soins. Si le risque diminue, l'incidence, elle, devrait augmenter malgré tout car l'espérance de vie augmente ainsi que le nombre des personnes âgées.De plus, on ne sait pas encore dans quelle mesure certains facteurs tels que l'obésité et le diabète pourraient affecter cette tendance d'où l'importance d'améliorer encore l'information, le dépistage et le traitement de la DMLA. Dans le même ordre d'idée, une étude présentée lors de l'EURETINA 2017 et réalisée sur base d'une revue d'études épidémiologiques publiées ces 20 dernières années montre, qu'en Europe, la prévalence des formes précoces et intermédiaires de la DMLA diminue pour atteindre 41 % des personnes de plus de 60 ans et la prévalence des formes atrophiques se stabilise autour de 3,6 % mais ce chiffre pourrait être sous-évalué compte tenu de la difficulté à obtenir des examens ophtalmologiques en nombre suffisant chez ces patients très âgés.Les anti-VEGF ont révolution l'approche thérapeutique de la DMLA exsudative en permettant une stabilisation et, le plus souvent, une augmentation de l'acuité visuelle ainsi que l'amélioration fonctionnelle de la rétine. Mais, il s'agit d'un traitement lourd et contraignant (visites et injections souvent mensuelles) tant pour le patient et son entourage que pour les services d'ophtalmologie qui ont vu leur fréquentation grimper en flèche pour atteindre, dans nombre de cas, la saturation. D'où la nécessité de trouver des protocoles allégés, moins contraignants mais qui garantissent l'efficacité du traitement.Lors de l'EURETINA 2017, plusieurs études ont été présentées comparant différents schémas d'administration. Ainsi, l'étude prospective, randomisée et multicentrique CAN-TREAT a montré, sur un suivi de 1 puis de 2 ans, qu'un protocole Treat&Extend avec le ranibizumab était non inférieur sur le plan de l'efficacité à un protocole d'injections mensuelles systématiques, générait moins de visites et nécessitait moins d'injections.Ce protocole Treat&Extend débute par trois injections de ranibizumab à 1 mois d'intervalle (phase d'induction) et se poursuit par des injections mensuelles jusqu'à stabilisation de l'affection objectivée par OCT et acuité visuelle. Ensuite, l'intervalle entre injections est augmenté par paliers de 2 semaines jusqu'à un intervalle maximum de 12 semaines. A 1 an (résultats complets), le gain en nombre de lettres était significativement supérieur pour le protocole Treat&Extend vs l'injection mensuelle (+8,4 vs +6) et il était équivalent (+7 vs +6,5) à 2 ans (résultats partiels).Un intervalle de 8 semaines entre injections était possible pour 71 % des patients à 2 ans et, pour 40 % des patients, un intervalle de 12 semaines était possible à 2 ans. Autre exemple avec l'étude de phase IV ALTAIR menée en open label dans 40 centres au Japon dans le but de comparer l'efficacité et la sécurité d'un traitement par aflibercept administré selon 2 protocoles Treat&Extend différents, l'un avec intervalle entre injections augmenté par palier de 2 semaines et l'autre avec augmentation par palier de 4 semaines. A 52 semaines de suivi, les investigateurs concluent à la faisabilité du protocole par palier de 4 semaines sur base de résultats quasi équivalents en terme d'amélioration de la vision et de la fonction de la rétine avec le protocole par palier de 2 semaines. Seul bémol, il faut rester prudent et, en cas de récidive, préférer revenir à un protocole par palier de 2 semaines.La forme atrophique de la DMLA est une affection à la physiopathologie multifactorielle ce qui a pour avantage d'offrir aux chercheurs de multiples voies à explorer pour améliorer un arsenal thérapeutique actuellement très restreint. La première voie intéressante est celle de l'inflammation chronique et plusieurs agents anti-inflammatoires sont à l'étude. D'abord, l'implant intraoculaire de fluocinolone déjà autorisé pour l'oedème maculaire diabétique.Ensuite, et malgré l'échec récent du lampalizumab, la voie de l'inhibition des facteurs du complément reste d'actualité avec les inhibiteurs du facteur C3 et du facteur C5 administrés en IV. Enfin, il y a l'acétate de glatiramer, un immunomodulateur administré en SC qui agit sur la différenciation des lymphocytes T. Autre voie explorée, celle des agents neuroprotecteurs avec des essais sur la brimonidine ainsi que sur un implant intravitréen qui libère de façon continue et prolongée du CNTF (Ciliary Neurotrophic Factor-501) qui s'est révélé protecteur des photorécepteurs sur un modèle animal. Mais le plus grand espoir actuel réside dans l'utilisation de cellules souches.Plusieurs essais menés en France et au Japon montrent qu'il s'agit là d'une voie intéressante mais deux gros problèmes restent à régler, celui du choix du type de cellules à greffer et celui de la meilleure méthode d'implantation des cellules sur la rétine.