...

Le Dr Filip Baert (AZ Delta, Roeselare-Menen), gastroentérologue spécialisé dans les MICI, a co-signé l'étude CALM." Jusqu'à présent, le concept 'Treat to target' (T2T) restait essentiellement théorique dans les MICI. Nous nous sommes demandés si nous pourrions, avec les nouveaux médicaments, non seulement arrêter chez un certain nombre de patients le traitement par cortisone et obtenir une rémission, mais aussi guérir l'intestin. L'idée sousjacente étant que la guérison de l'intestin limiterait les complications telles que l'hospitalisation et la chirurgie. Les résultats de l'étude CALM démontrent pour la première fois que ce concept fonctionne, tout du moins chez les patients MICI récemment diagnostiqués. "CALM est une étude prospective, ouverte, multicentrique de phase III incluant des patients souffrant d'une maladie de Crohn modérée à sévère, encore naïfs de traitement immunosuppresseur et de médicaments biologiques. Ils ont été randomisés entre des traitements standards et un algorithme T2T. Le traitement incluait l'adalimumab avec optimisation des doses tous les quinze jours ou toutes les semaines, auquel on ajoutait ensuite de l'azathioprine, puis des stéroïdes : le " step-up " n'a été prévu dans le bras standard de l'échantillon que lorsque le patient ne présentait plus de symptômes, et dans le bras T2T lorsque la CRP et la calprotectine étaient normalisées." Après deux ans, les patients ont été évalués, notamment via une colonoscopie et une RMN de l'intestin grêle. Nous avons constaté déjà une meilleure cicatrisation de la muqueuse dans le groupe T2T - ce qui a étonné tous les chercheurs - et moins de chirurgies et de complications au cours de cette courte période, alors que nous ne nous attendions à assister à cette tendance qu'au bout de 5 à 10 ans. Donc, la prise en charge T2T était plus efficace au niveau de l'intestin et entraînait moins de complications déjà à court terme. Ceci plaide pour un traitement plus puissant chez les nouveaux patients et pour la fixation d'objectifs plus ambitieux : il faut non seulement lutter pour qu'un patient se sente bien, mais aussi pour obtenir une rémission biochimique. "Remsima® et Inflectra® sont deux biosimilaires disponibles de l'infliximab, auxquels s'ajoutera bientôt Flixabi®. En 2019, un biosimilaire de l'adalimumab devrait arriver. " A l'hôpital, nous donnons depuis deux ans déjà un biosimilaire comme nouveau traitement à tous les nouveaux patients. Et depuis le début de cette année, nous avons contraint les patients qui étaient sous anti-TNF à passer à un biosimilaire, après les avoir informés en détails. " Un changement qui s'est réalisé avec succès, conformément aux attentes. "Nous avons attendu jusqu'à ce que les premières données sur le biosimilaire dans les MICI soient disponibles. En Norvège, les autorités ont imposé de passer de l'original au biosimilaire dans tout le pays. Ce changement a été étudié dans l'étude NOR SWITCH et s'est révélé sûr et tout aussi efficace. La même expérience a été tentée en Hongrie et a aussi fait l'objet d'une publication. "Le suivi de la concentration sérique d'anti-TNF chez le patient est une prestation qui a pu être ajoutée dans le formulaire de l'hôpital, du fait de la reconnaissance des biosimilaires. Il n'était réalisé que dans des cas précis, car le test n'était pas remboursé. " Désormais, il peut être réalisé systématiquement dans notre hôpital, qui plus est gratuitement pour le patient. Par conséquent, il est possible de mesurer l'évolution de l'effet du médicament dans le temps. En routine, nous donnons une dose standard d'infliximab à raison de 5 mg/kg aux semaines 0, 2 et 6 puis toutes les 8 semaines. Cependant, une même dose administrée à deux personnes de même poids corporel peut s'accompagner d'une concentration différente dans le sang. Grâce au suivi thérapeutique et à la médecine personnalisée, nous pouvons raccourcir ou augmenter l'intervalle entre les administrations, en fonction de la concentration individuelle dans le sang. Durant des années, nous avons procédé à cette optimisation en fonction des effets rapportés par le patient. En utilisant les taux sanguins, notre optimisation s'avère beaucoup plus rationnelle. "Avec l'argent épargné par l'hôpital qui passe à un biosimilaire, une infirmière spécialisée en MICI peut être engagée pour mettre en place un parcours de soins plus structuré. " Cette infirmière fait le lien entre les patients et les soignants ; non seulement avec les spécialistes dans le service hospitalier mais aussi, nous l'espérons, également avec le généraliste dans un avenir proche. Le patient peut ainsi obtenir des informations très accessibles et recevoir des conseils. " Depuis, l'association BINA -Belgian IBD Nurse Association - a été fondée.Depuis septembre 2016, le premier représentant de la classe des anticorps anti-intégrines, vedolizumab (Entyvio®) est remboursé sous forme IV. Une forme sous-cutanée est en cours de développement. Là où les anti-TNF ont une action plus systémique (s'attaquant, en plus des MICI, aux maladies rhumatismales et au psoriasis), le vedolizumab présente une action sélective sur l'intestin, de sorte que le profil de sécurité est meilleur. Il s'adresse aux patients atteints de comorbidités importantes (diabète, BPCO...) ou aux personnes à risque d'infection ou ayant des antécédents de cancer. Les patients présentant des symptômes systémiques bénéficieront d'autre part davantage d'un produit dont l'action est plus systémique. " On peut aussi différencier la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse. Dans l'ensemble, nous nous attendons à une réponse chez 80 % des patients et une rémission chez 40-50 % d'entre eux sous anti-TNF, alors que le taux de réponse global est de 40-50 % sous vedolizumab. Mais généralement, la colite ulcéreuse est une indication quelque peu meilleure pour le vedolizumab qu'un anti-TNF, à l'exception de la colite aiguë grave du fait d'une réponse légèrement plus rapide après un anti-TNF que le vedolizumab. "Dans le courant de cette année, au plus tard début 2018, l'ustekinumab (Stelara®) sera également lancé pour le traitement des MICI. Il s'agit d'un anticorps monoclonal anti-IL12/23, qui n'est pas sélectif pour l'intestin, mais s'avère très sûr. Un autre représentant de cette classe, le risankizumab est en développement, mais est encore plus prometteur.Et une autre classe attendue est celle des inhibiteurs de JAK, de petites molécules qui agissent au niveau intracellulaire suivant un mécanisme différent et qui seront disponibles per os : notamment le filgotinib et le tofacitinib, qui sont étudiés dans les MICI.