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La 6e réforme de l'État a consacré plusieurs zones de soins en Belgique. Aujourd'hui, cela fonctionne comme si plusieurs pays - les entités fédérées en réalité - avaient signé des accords entre eux. Si une période transitoire de trois ans est prévue, les patients vont peu à peu voir des différences de traitement s'installer. Exemple : Un Flamand travaille à Bruxelles. Il veut consulter un tabacologue de la capitale. Il peut évidemment le faire, mais le tabacologue devra s'enregistrer au cadastre flamand et devra encoder les séances dispensées pour recevoir l'intervention en tiers-payant de Flandre." La vision est différente en Flandre par rapport à la Wallonie et Bruxelles ", explique Émilie Vanderstichelen, coordinatrice matières régionales au sein des Mutualités libres. " La Flandre est bien plus libérale que la Wallonie, davantage sociale. Si l'Aviq est un modèle reconnu, notamment en intercabinets, il faut reconnaître que la Flandre a une vision depuis une dizaine d'année. " La sixième réforme voulue par la Flandre, il aurait été étonnant qu'elle n'ait pas un plan concernant le transfert des matières. Et on n'est clairement pas déçu : une sécurité sociale flamande se met même en place : la Vlaamse sociale bescherming (VSB). Dotée d'un budget de prêt de 4 milliards d'euros, elle comprend l'assurance dépendance déjà mise en place, l'aide aux personnes handicapées, l'aide et les soins résidentiels pour personnes âgées, les aides à la mobilité ou encore les maisons de soins psychiatriques. La 1re ligne et les hôpitaux sont de la compétence du ministre flamand de la Santé.Les mutuelles regretteront l'abandon de la logique paritaire au nord du pays. Elles ne seront plus co-gestionnaires des matières de santé gérées désormais par la Flandre. Un peu comme en France et ses caisses régionales d'assurance maladie, les zorgkassen remplacent progressivement les mutualités et l'Agence pour les soins de santé reprend les compétences. Les mutuelles sont toutefois présentes au sein de ces caisses.En Wallonie, c'est l'Aviq, l'Agence pour une vie de qualité, qui fait le job. Par rapport à IrisCare à Bruxelles, l'OIP wallon a l'avantage d'être bâti sur une infrastructure existante, l'Agence Wallonne pour l'intégration des Personnes Handicapées (Awiph), dont elle reprend l'ensemble des compétences. À cela s'ajoutent la première ligne, les infrastructures hospitalières et la santé mentale. De quoi parler d'un Inami régional.La logique paritaire persiste au sud du pays, ce qui fait plaisir aux mutuelles. La plupart des compétences précédemment gérées par l'Inami s'y retrouvent. En Wallonie, la volonté est que le citoyen ne sente pas cette différence induite par la réforme.La grande originalité de la structure - ce qui fait son succès en intercabinets en somme - c'est son Conseil de stratégie et de prospective. Avec sa fonction consultative, la Wallonie attend beaucoup de lui en vertu de l'adage " il vaut mieux prévenir que guérir ". Des experts de tous poils (universitaires, patronat, syndicats, mutuelles, associations d'usagers) y siégeront.Rappelons qu'une assurance autonomie est prévue mais qu'elle n'entrera en action qu'en 2021. La cotisation de 36 euros est obligatoire depuis le 1er janvier pour les Wallons âgés de 26 ans et plus.La situation est plus complexe à Bruxelles. Si complexe que l'urgence régnait à l'aube du 1er janvier. Pourquoi ? Parce qu'il manque de personnel, mais également de temps de formation pour reprendre des matières si complexes.La Région de Bruxelles capitale s'est mis d'accord sur deux institutions et non une (pourquoi faire simple finalement ?) : IrisCare et la Cocom.Un Comité général de gestion fixera ainsi le budget d'IrisCare et ses grandes orientations. Copie de l'Inami, il est composé paritairement des syndicats traditionnels, des organismes assureurs, des prestataires de soins et du collège réuni. Les médecins et les mutuelles n'ont droit de vote que sur les matières les concernant. L'OIP bruxellois gérera la santé mentale, prévention et 1re ligne de soins, accueil et dépendance, et personnes handicapées.Les autres matières échappent à cette gestion paritaire du Comité général de gestion d'Iriscare et sont gérées par l'administration de la Cocom : l'entièreté de la politique hospitalière, les soins de santé mentale hors hôpitaux, l'organisation proprement dite des soins de santé de 1re ligne et le soutien aux professions de 1re ligne.On assiste donc à une répartition alambiquée des compétences entre IrisCare et l'administration. Toutefois, mutuelles et syndicats de médecin peuvent se réjouir d'être moins sur la touche qu'en Flandre.N'oublions pas la Communauté germanophone. Concernant les mutuelles, elle est encore plus radicale que la Flandre puisqu'elle a décidé de simplifier les structures pour le traitement des matières transférées par la 6e réforme de l'État. Conséquence : les mutualités ne sont plus gestionnaires des matières transférées en communauté germanophone. Cette dernière possède son propre OIP, la Dienststelle für selbstbestimmtes leben (DSL) ou Agence pour une qualité de vie, ou un clone de l'Aviq, c'est selon.L'Ostbelgien procède donc par subsidiation directe dans le financement d'une MRS par exemple. Les mutualités n'ont qu'un rôle consultatif, si besoin est. Autant dire qu'elles ne sont pas ravies de la direction prise par l'est de la Belgique.