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Longtemps négligées en tant que cause de morbidité et de mortalité, les envenimations par morsure de serpents font enfin l'objet d'une réelle attention. Après les avoir reconnues comme maladies tropicales négligées en juin 2017, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a adopté une résolution appelant à "des mesures immédiates et efficaces".Il faut dire que chaque année, plus de cinq millions d'individus sont mordus par des serpents venimeux, quelque 125 000 en meurent et 400 000 survivants gardent d'importantes séquelles physiques et psychiques. Et ce n'est probablement que la pointe de l'iceberg car bon nombre de victimes n'atteignent jamais un centre de soins et ne sont donc pas recensées.C'est dans ce contexte que des scientifiques ont réalisé une carte planétaire des "zones de vulnérabilité" des populations. Pour y parvenir, ils ont effectué une modélisation de la distribution géographique des 278 espèces de serpents dangereuses recensées par l'OMS en prenant en compte trois critères : le temps de transport vers les établissements de soins, la qualité des soins au niveau national et la disponibilité de traitements spécialisés.L'intégration de plusieurs paramètres est importante. Par exemple, les serpents les plus dangereux se situent en Australie, mais étant éloignés des espaces occupés par l'homme, les cas de morsures sont rares et la moyenne de décès se situe à une victime par an.De plus, si les zones les plus touchées par les morsures de serpent sont l'Asie du Sud, l'Afrique centrale et de l'Ouest, l'Amérique du Sud et centrale et l'Océanie, les résultats révèlent que les zones vulnérables importantes se situent en Afrique centrale et en Asie dans les régions rurales et dans la savane, éloignées des centres hospitaliers tout en étant proches des espaces d'habitat des serpents. Par ailleurs, les pays les plus touchés sont le Bénin, le Congo-Brazzaville, l'Éthiopie, la Birmanie, le Nigeria, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et le Soudan du Sud.Ce travail révèle aussi qu'au total quelque 93 millions d'individus vivent dans des zones reculées vulnérables avec des serpents venimeux et que, s'ils sont mordus, ils risquent davantage de mourir que ceux vivant en milieu urbain en raison du faible accès aux médicaments anti-venins.Grâce à cette carte planétaire indiquant les lieux où l'on doit agir en priorité et mettre à disposition des traitements anti-venins rapidement, les pays membres de l'OMS concernés bénéficieront d'une feuille de route pour lutter contre les morsures de serpents. (référence : The Lancet, 12 juillet 2018, doi : 10.1016/S0140-6736(18)31224-8)https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(18)31224-8/fulltext