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En diminuant la toux, la sécrétion de mucus et la fréquence respiratoire, certains opiacés comme la morphine ou la codéine ainsi que certains opioïdes comme le fentanyl altèrent les défenses immunitaires du poumon et sont, de ce fait, considérés comme des immunosuppresseurs. D'où l'hypothèse de travail des investigateurs de la présente étude: les opiacés augmentent-ils le risque de pneumonie communautaire au sein de la population générale et, en particulier, chez les patients vivant avec le VIH dont le système immunitaire est déjà mis à mal par le virus ? Pour répondre à cette question, ils ont conduit une étude de type cas-témoins basée sur les données des patients de l'étude observationnelle VACS (Veterans Aging Cohort Study). Deux groupes équipotents ont été définis, 21.146 patients exempts de pneumonie (témoins) et 4.246 patients hospitalisés pour une pneumonie communautaire. Il s'agit en majorité d'hommes (98,8%) âgés de 55 ans en moyenne. Un sous-groupe de patients vivant avec le VIH a aussi été déterminé afin d'évaluer le lien pneumonie-opiacés chez ces patients particulièrement vulnérables.Les résultats confirment l'hypothèse en démontrant que la prescription d'opiacés et opioïdes constitue un facteur de risque indépendant qui augmente le risque de pneumonie communautaire tant au sein de la population générale qu'au sein du groupe des patients vivant avec le VIH. Ce risque augmente en fonction de la dose prescrite, de la durée de prescription et des propriétés immunosuppressives de l'antalgique. Pour les patients vivant avec le VIH, la sensibilité est encore plus forte puisque le risque de développer une pneumonie communautaire augmente déjà pour des doses plus faibles et des durées de prescription plus courtes qu'au sein de la population générale. Dans leurs conclusions, les investigateurs prônent une limitation de la prescription de ces opiacés immunosuppresseurs en cas d'infection VIH. Il faut éviter surtout les fortes doses et les traitements prolongés. Comme la douleur intense et chronique est un symptôme très fréquent chez les patients VIH ce qui pour beaucoup rend le recours aux opiacés quasi incontournable, les investigateurs suggèrent de favoriser la prévention du risque de pneumonie via la vaccination contre le pneumocoque et la grippe ainsi que la cessation tabagique. Ces mesures préventives sont aussi d'application pour les nombreux patients toxicomanes vivant avec le VIH pour lesquels ce risque de pneumonie est encore plus grand.Réf: Edelman EJ et al. JAMA Internal Medicine, article mis en ligne sur le site 07/01/2019.