Le médecin va de chambre en chambre, appelle chaque malade par son nom, lui demande comment il va, écoute sa réponse, réagit, l'examine et fait le point.

Il travaille seul, poussant un chariot avec un ordinateur connecté au réseau de l'hôpital. Avant d'entrer, il explore un dossier électronique où se trouvent les notes des médecins de l'équipe, les avis des spécialistes consultés, les protocoles techniques, les traitements, les paramètres vitaux et les observations du nursing. Il faut appeler de nombreux écrans pour arriver aux informations nécessaires, les temps de réponses durent parfois une éternité. Le médecin se soucie de la lisibilité des instructions pour les soignants et vérifie si elles correspondent à ce qui est vraiment fait au malade. Ce dernier reçoit-il bien les médicaments prescrits ? Gare aux erreurs ! Il cherche à contacter un généraliste. Pas de chance, ses coordonnées ne se trouvent pas à la place prévue dans le dossier. Qu'à cela ne tienne, une secrétaire appelée à la rescousse revient avec un numéro de téléphone sur un bout de papier.

Bugs

Le temps passe. Les bugs (apparents ou avérés) donnent l'impression de faire du sur place. Pourtant, petit à petit, tous les malades sont vus dans le timing avec un heureux équilibre entre contacts humains et exigences techniques.

Merveilles de l'informatique permettant tout cela ? Pas d'enthousiasme excessif ! Il reste un énorme travail d'amélioration des logiciels pour faciliter l'encodage, rendre les informations claires et accessibles à tous sans redondance, sans répétitions fastidieuses des écritures et sans gaspillages, si épuisant pour les équipes, du temps peu compressible à répondre aux besoins des malades.

Cette expérience m'a convaincu de la justesse du vieil adage : " Tout change parce que rien ne change ". La manière de faire le tour de salle a changé, mais pas les fondamentaux. Il s'agit toujours de mobiliser de nombreux métiers autour de chaque malade individuel, ce qui implique d'une part du temps dévolu à la clinique pour se rendre compte de l'efficacité des soins et d'autre part, du temps dévolu à la communication fluide entre professionnels au moyen d'un outil efficace. En cette période de transition de l'outil papier au dossier médical informatisé, ces fondamentaux restent plus que jamais de mise.

Circuits courts et longs

Ils impliquent toujours un subtil équilibre entre des circuits de communication courts (directs) et longs (indirects). Avec le papier la proportion des contacts directs était élevée : le tour de salle mobilisait le médecin et l'infirmière, chacun écrivant de son côté. Les spécialistes donnaient leurs avis sur place, après avoir vu le patient. Dans notre histoire, le médecin tourne seul. Il maintient les contacts directs avec le malade et communique avec les autres professionnels par ordinateur interposé. D'où l'impression de déshumanisation si souvent reprochée à l'informatique. Mais à regarder les choses de plus près, à la condition expresse d'avoir une informatique bien pensée à la fois par les utilisateurs et par les informaticiens, l'électronique peut, paradoxalement, favoriser les contacts directs, personnels et humains, même à travers des circuits longs. Pour cela, toutes les parties doivent évidemment faire preuve des qualités de patience et d'écoute que j'ai pu observer au cours de cette immersion dans un tour de salle.

Le médecin va de chambre en chambre, appelle chaque malade par son nom, lui demande comment il va, écoute sa réponse, réagit, l'examine et fait le point.Il travaille seul, poussant un chariot avec un ordinateur connecté au réseau de l'hôpital. Avant d'entrer, il explore un dossier électronique où se trouvent les notes des médecins de l'équipe, les avis des spécialistes consultés, les protocoles techniques, les traitements, les paramètres vitaux et les observations du nursing. Il faut appeler de nombreux écrans pour arriver aux informations nécessaires, les temps de réponses durent parfois une éternité. Le médecin se soucie de la lisibilité des instructions pour les soignants et vérifie si elles correspondent à ce qui est vraiment fait au malade. Ce dernier reçoit-il bien les médicaments prescrits ? Gare aux erreurs ! Il cherche à contacter un généraliste. Pas de chance, ses coordonnées ne se trouvent pas à la place prévue dans le dossier. Qu'à cela ne tienne, une secrétaire appelée à la rescousse revient avec un numéro de téléphone sur un bout de papier.Le temps passe. Les bugs (apparents ou avérés) donnent l'impression de faire du sur place. Pourtant, petit à petit, tous les malades sont vus dans le timing avec un heureux équilibre entre contacts humains et exigences techniques.Merveilles de l'informatique permettant tout cela ? Pas d'enthousiasme excessif ! Il reste un énorme travail d'amélioration des logiciels pour faciliter l'encodage, rendre les informations claires et accessibles à tous sans redondance, sans répétitions fastidieuses des écritures et sans gaspillages, si épuisant pour les équipes, du temps peu compressible à répondre aux besoins des malades.Cette expérience m'a convaincu de la justesse du vieil adage : " Tout change parce que rien ne change ". La manière de faire le tour de salle a changé, mais pas les fondamentaux. Il s'agit toujours de mobiliser de nombreux métiers autour de chaque malade individuel, ce qui implique d'une part du temps dévolu à la clinique pour se rendre compte de l'efficacité des soins et d'autre part, du temps dévolu à la communication fluide entre professionnels au moyen d'un outil efficace. En cette période de transition de l'outil papier au dossier médical informatisé, ces fondamentaux restent plus que jamais de mise.Ils impliquent toujours un subtil équilibre entre des circuits de communication courts (directs) et longs (indirects). Avec le papier la proportion des contacts directs était élevée : le tour de salle mobilisait le médecin et l'infirmière, chacun écrivant de son côté. Les spécialistes donnaient leurs avis sur place, après avoir vu le patient. Dans notre histoire, le médecin tourne seul. Il maintient les contacts directs avec le malade et communique avec les autres professionnels par ordinateur interposé. D'où l'impression de déshumanisation si souvent reprochée à l'informatique. Mais à regarder les choses de plus près, à la condition expresse d'avoir une informatique bien pensée à la fois par les utilisateurs et par les informaticiens, l'électronique peut, paradoxalement, favoriser les contacts directs, personnels et humains, même à travers des circuits longs. Pour cela, toutes les parties doivent évidemment faire preuve des qualités de patience et d'écoute que j'ai pu observer au cours de cette immersion dans un tour de salle.